Life isn't about waiting for the storm to pass...It's about learning to dance in the rain ◈ Mélanie

« Tu vas tellement me manquer… » Le nez enfoui dans le torse de Ian, Mélanie inspira profondément, s’enivrant une dernière fois de l’odeur familière de son eau de cologne. C’était le grand jour, elle l’avait attendu avec impatience, et voilà que l’heure du départ était arrivée. Ses bagages étaient bouclés et empilées dans le coffre de sa vieille Ford Capri et de longues heures de routes l’attendaient. Elle était fin prête, excitée à l’idée d’entamer une nouvelle vie loin de la grisaille de la capitale, et pourtant, elle peinait à se détacher des bras de Ian. Il était son meilleur ami, son amour, son amant, et le laisser derrière elle lui fendait le cœur. « Allez, Tampa c’est pas le bout du monde Mel, on a des téléphones portables, skype… On sera jamais réellement séparés… » Il se voulait rassurant mais il ne l’avait pas lâchée pour autant, ses deux bras la maintenaient fermement contre lui et, parce qu’elle le connaissait par cœur, Mélanie décelait dans sa voix de petits trémolos provoqués par la tristesse. Laissant échapper un soupir à vous fendre l’âme en deux, elle se détacha finalement de lui et esquissa un sourire pour se donner un peu de courage. « Tu viens aux prochaines vacances hein ? », « Je serais là, c’est promis ».


« Alors, comment tu trouves ton nouveau chez-toi ? » Un immense sourire aux lèvres, son bras passé autour des épaules de sa cadette, Cece observait avec fierté l’appartement qu’elle avait aménagé pour Mélanie. C’était parfait, accueillant, moderne, chaleureux, joliment décoré. « J’aurais pas mieux fait moi-même, tu fais des merveilles Cece ! » Malgré la fatigue et l’absence de Ian qui lui coûtait beaucoup, Mélanie était aux anges. Elle avait hâte de prendre ses marques dans cette nouvelle ville et d’entamer sa formation au Zoo.


« Comment ça tu ne viens pas ? Ian, ça fait trois mois qu’on ne s’est pas vus ! T’as déjà annulé la dernière fois ! » Même si elle essayait de se faire discrète et de ne pas élever le ton, Mélanie sentait la colère et la frustration gagner du terrain. Réfugiée dans un coin du réfectoire réservé au personnel, la petite brune fulminait, son téléphone vissé à l’oreille. C’était déjà la troisième fois que Ian annulait une de ses visites, et même si elle faisait tout pour se convaincre que tout allait bien, que ce n’était que partie remise, Mélanie commençait à croire que le proverbe disait vrai. Loin des yeux, loin du cœur. Même si ils s’étaient promis de continuer à avancer ensemble malgré la distance, cette année et demi de séparation n’avait pas joué en faveur de leur couple qui malgré tous les efforts de la jeune femme, semblait battre de l’aile. La passion s’essoufflait. « Tu sais quoi Ian ? Si tu ne viens pas cette fois, ne prend pas la peine de venir une autre fois. » Appuyant sur le bouton de fin d’appel, Mélanie fit quelques pas dans le réfectoire avant de se laisser tomber sur une chaise en face de Calypso, sa collègue. « C’est quoi l’excuse cette fois ? » Un soupir agacé franchit les lèvres de Mélanie qui serra les dents quelques secondes avant de répondre. Elle avait besoin de retrouver un semblant de calme avant de répondre à la jeune femme. « J’en sais rien, trop de boulot. Trop de dossiers… J’en peux plus… ». Se massant les tempes, les yeux clos, elle inspira et expira profondément avant de se redresser et de laisser échapper un nouveau soupir, résignée. « Tu crois que c’est fini ? »


C’était terminé. Il avait fallu deux annulations de plus pour que Mélanie prenne enfin la décision de tout arrêter. Même si leur rupture avait été difficile à digérer, la jolie brune se sentait désormais libérée. Après tout, ils n’avaient fait qu’officialiser une situation qu’ils n’avaient laissé trainer que trop longtemps. Malgré tout, c’est encore les yeux rouges et gonflés qu’elle se présentait parfois au zoo après avoir passé la nuit à pleurer. Elle vivait plutôt bien la situation, même si il lui arrivait parfois de regretter Ian. Surtout lorsqu’elle se sentait seule et qu’elle réalisait qu’elle ne pouvait plus l’appeler juste pour se rassurer en entendant le son familier de sa voix à l’autre bout du fil. Refermant la porte de son casier dans lequel elle avait rangé son sac à dos et son téléphone après avoir vérifié, par habitude, que Ian ne lui avait pas envoyé de message, Mélanie croisa le regard de Maxim et lui adressa un sourire. « Salut… » Souffla-t-elle avant de se mordre légèrement la lèvre inférieure en détournant son regard du grand brun. Il la mettait mal à l’aise, mais pas dans le mauvais sens du terme. Non, Maxim la troublait. Dès son premier jour en tant que stagiaire au sein du zoo, le jeune homme lui avait fait forte impression, un sentiment qu’elle s’était appliquée à reléguer dans un coin de sa tête. Après tout, elle n’était pas célibataire et tromper Ian ne lui ressemblait pas. Seulement maintenant qu’elle n’était plus en couple, Mélanie avait du mal à rester totalement insensible au charme du soigneur. Peut-être même, n'en avait-elle pas du tout envie...


« Attendez, vous êtes en train de me dire que mon propre corps me déteste c’est bien ça ? » Les sourcils froncés, Mélanie observait le médecin qui lui faisait face. Visage fermé, ses lunettes en demi-lune vissées sur le nez, il lui paraissait trop calme, trop lisse alors que son monde entier était en train de s’écrouler. Elle avait envie de lui sauter au visage, de lui arracher ses lunettes, de lui faire mal. Elle voulait qu’il réagisse plutôt que d’avoir à supporter le calme olympien qu’il affichait. Un lupus. Un putain de lupus. « On peut dire ça comme ça… Le lupus est une maladie auto-immune, votre corps fabrique lui-même des anticorps qui s’attaquent aux tissus sains et les détruisent comme ils le feraient avec un virus ou une maladie. Avant tout, je tiens à ce que vous sachiez que vous pouvez mener une vie tout à fait convenable malgré la maladie à condition bien sûr de suivre un régime stricte et d’adopter une certaine hygiène de vie. Les médicaments que je vais vous prescrire devraient vous permettre de vivre relativement normalement. Je ne vous cache pas que vous risquez de souffrir, mais vous n’en mourrez pas. Pas dans l’immédiat en tout cas… Vous avez encore de belles années devant vous ». C’était facile à dire. Ce n’était pas lui qui allait devoir se gaver de médicaments à longueurs de journées. Il n’aurait pas à supporter la fatigue et les douleurs liées à la maladie. Fermant les yeux pour retenir les larmes qui menaçaient de rouler sur ses joues, Mélanie prit une longue inspiration. Elle allait devoir se battre.